ADOPTION
Villages Mwana a eu l’immense privilège d’accueillir et de mettre en relation des familles adoptives originaires du Congo, de France et des États-Unis. Nous prenons l’engagement formel de respecter des procédures d’adoption éthiques et transparentes. Nos familles adoptives deviennent d’ardents défenseurs de Villages Mwana et soutiennent notre projet, car ce sont des personnes pour qui l’adoption n’est pas seulement l’accueil d’un enfant dans une famille. C’est aussi un appel à partager une petite part d’un grand projet, à savoir : rendre autonomes les plus démunis.
PENSÉES AVEC UNE MÈRE ADOPTIVE CONGOLAISE
Pouvez-vous nous parler un peu de votre parcours?
Je suis née dans les années 80 à Brazzaville (Congo), j'ai eu une enfance normale dans les rues de Mpissa, quoique perturbée très tôt par la séparation de mes parents.
Très jeune, mon père m'emmenait dans des orphelinats, des maisons de retraite, des prisons… pour rendre visite et partager de la nourriture avec eux. Cela m’a rendue très sensible. J’en pleurais à chaque fois. J’étais aussi un enfant très têtu lol, je me rappelle que je m'échappais de la maison après l’école pour jouer à l'extérieur avec d'autres enfants, même si mon père me l’interdisait. C’est moi: très têtue mais très sensible. Quand je voyais quelqu'un souffrir, c'était comme une croix sur mon épaule. J'ai donc grandi avec ce rêve d'ouvrir un orphelinat quand je serais adulte.
Comment avez-vous décidé d'adopter? Est-ce que quelque chose dans votre vie a développé ce désir d'adopter?
Cela a toujours été dans ma tête, et alors que les choses devenaient différentes à mesure que je grandissais, je n’avais jamais abandonné ce rêve. Je pense que Dieu a rendu les choses possibles en 2013 quand, à 6 mois de grossesse, j'ai perdu un bébé et découvert que j'étais diabétique. J'ai alors dit à Dieu d'avoir un contrôle total parce que j'étais fatiguée de chercher à concevoir à nouveau. Puis un jour, un collègue m'a dit qu'il ouvrait un orphelinat avec sa femme, j’ai tout de suite voulu visiter ce centre pour enfants abandonnés.
Le jour de ma visite, ils avaient reçu l'un des premiers bébés arrivé il y a quelques jours, une petite fille très fragile et malade. Cheryl, la responsable, m’a proposé de l’accompagner à l’hôpital faire une visite à la petite fille qui avait quelques soucis de santé et, alors que je l’ai prise dans mes bras, il y a un phénomène qui s’est produit que je ne pourrai expliquer, en fait j’en suis tombée amoureuse, j’ai vraiment eu l’impression de porter mon bébé surtout qu’elle a posé sa main sur ma poitrine. J’ai vu là un signe de Dieu. Elle avait de grands yeux, tout comme les miens !
Par la suite, je lui ai rendu visite régulièrement et mon rêve d'adopter m’est revenu en tête. Je me suis dit: «Et si c’était possible ? Je suis seule, c’est vrai, mais j’ai un travail où je peux prendre soin d’un bébé. J'aime les bébés alors quel peut être l'obstacle? ». « Est-ce possible au Congo » autant de questions qui me revenaient. Quelques mois plus tard, j'ai fait part à Cheryl de mon envie d’adoption qui a tout de suite été bien accueillie, et après toutes les formalités judiciaires, je suis devenue la mère bénie d'une petite fille. Je l’appelle Ma Grâce. A la maison, mes sœurs étaient tellement joyeuses d’accueillir notre fille, mon père en était très fier bien que géographiquement loin de nous.
L'adoption pour les enfants avec lesquels vous n'êtes pas liés biologiquement est rare au Congo. Pouvez-vous partager avec nous certaines des réactions que vous avez eues lorsque les gens apprennent que votre fille est adoptée?
Je ne l'ai pas caché, parce que c'était une réalité (je n’avais pas été enceinte donc impossible de faire genre) et surtout une grâce de Dieu. Je voulais partager avec les gens de mon entourage proche, en particulier avec celles de ma génération, pour leur montrer qu'il est possible, surtout ici en Afrique, où une femme sans enfant peut être stigmatisée par sa famille ou sa belle-famille à cause du simple fait qu’elle ne conçoit pas. J'ai grandi avec l'idée que votre mère est celle qui vous éduque, qui prend soin de vous, qu’elle vous ait donné naissance ou pas. Certaines personnes ont été surprises parce qu’en réalité c’est encore tabou chez nous. Du moment que j’étais convaincue que ce que je faisais était bien, je me suis pas souciée des jugements que les gens pouvaient porter à notre égard.
Je tiens à préciser ici que l’objectif n’est aucunement lié à une envie de me vanter ou quoique ce soit, il est d’ailleurs écrit dans les Saintes Ecritures –je le dirai avec mes mots - que ce que ta main droite donne, que ta main gauche ne le sache pas. Le but ici à travers ce petit témoignage, c’est de faire comprendre à la nouvelle génération à ces femmes qui ont connu la même situation de sècheresse que moi, que rien n’est impossible à Dieu. Et pas qu’aux femmes, à nos mamans, à nos maris, à nos beaux-parents…je reste convaincue ; et c’est très courant ici de voir un oncle prendre ses neveux avec lui, les traiter comme ses enfants, c’est à féliciter ; on a aussi vu des femmes traiter les enfants de leurs conjoints comme des esclaves sous prétexte qu’elle ne les a pas mis au monde. Tout converge vers un seul point : un enfant reste un enfant que vous l’ayez accouché ou pas, qu’il soit démuni ou pas donnons-leur de l’amour et tout ce qui va avec. Il y a beaucoup d’enfants qui ne demandent qu’à être considérés, qu’on les prenne par la main, qu’on les accompagne. Ils sont là pleins dans les centres d’accueil ; changeons le destin de ces enfants.
Pouvez-vous nous parler un peu de la personnalité de votre fille?
Elle a l'air timide mais elle ne l'est pas, tout comme moi en réalité. Très calme, avec de grands yeux, douce, adorable assez turbulente comme tous les enfants de son âge, avec un penchant pour le sport. Elle a récemment accueilli son petit frère, et en est très protectrice. Un proche m’a récemment dit que rien n’arrivait au hasard…j’ai simplement répondu qu’il fait grâce à qui il veut.